Luis Moreno-Ocampo : « Il est inacceptable que la COP29 se tienne à Bakou tant que des prisonniers arméniens sont toujours détenus »

EREVAN, 25 JUILLET, ARMENPRESS: Luis Moreno Ocampo, ancien procureur en chef de la Cour pénale internationale, a évoqué son initiative visant à appeler les Arméniens du monde entier à se mobiliser et à lancer une campagne médiatique contre la tenue de la 29e Conférence des Parties (COP29) sur le changement climatique de l'ONU à Bakou en novembre 2024, exigeant la libération des prisonniers arméniens détenus en Azerbaïdjan.

Luis Moreno-Ocampo a abordé ce sujet dans une interview accordée à « Armenpress ».

Ocampo indique que le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev tente d'utiliser la COP29 pour améliorer l'image de l'Azerbaïdjan. Il trouve paradoxal qu'Aliyev essaie de présenter cette conférence comme un forum de paix alors que des prisonniers arméniens, y compris d'anciens responsables militaires et politiques du Haut-Karabagh, sont actuellement détenus dans les prisons de Bakou.

« L'arrestation des prisonniers est un message adressé aux Arméniens du Haut-Karabagh: « Si vous retournez au Haut-Karabagh, vous risquez la punition, l'emprisonnement ou la mort ». Ce qui est alarmant, c'est que, pour des raisons géopolitiques, l'Azerbaïdjan parvient à éviter toute critique de la part de l'Europe et des États-Unis. Les nations restent silencieuses et préfèrent oublier. Néanmoins, le conseiller de l'ONU sur les questions de génocide a souligné qu'il existe un danger de génocide au Haut-Karabagh. Mais il ne peut pas affirmer qu'il y a eu génocide, car son mandat à l'ONU lui interdit de le qualifier ainsi. Il a seulement pu dire qu'il y a un danger de génocide, ce qu'il a fait », a expliqué Ocampo.

L'ancien procureur en chef de la Cour pénale internationale souligne que l'Azerbaïdjan a commis un génocide au Haut-Karabakh. « Le corridor de Lachine était le seul passage reliant le peuple du Haut-Karabakh au reste du monde. En le bloquant, l'Azerbaïdjan a isolé les gens et les a contraints à se soumettre, tandis qu'Ankara avait déjà menacé de les exterminer à plusieurs reprises. Il est donc évident que ce constitue un génocide », a-t-il souligné.

Il souligne que le déplacement forcé des populations est également une forme de génocide selon la Convention sur le génocide. Ocampo estime qu'il est essentiel de continuer à faire entendre la voix de ces événements et à agir, plutôt que de demeurer dans le silence. « Les Arméniens sont un exemple de résistance et de persévérance », a-t-il déclaré.

Il a rappelé que le président des États-Unis, Joe Biden, a reconnu le génocide arménien en 2021, mais a noté que Biden n'a rien dit sur le génocide survenu en 2023 au Haut-Karabakh, perpétré par l'Azerbaïdjan. « Combien de temps faudra-t-il avant que ce qui s'est passé au Haut-Karabakh soit reconnu comme un génocide ? Le rôle fondamental dans cette reconnaissance revient à l'Arménie et, avant tout, à la diaspora arménienne », a souligné Luis Moreno-Ocampo.

Il a souligné que c'est un grand honneur pour lui de pouvoir apporter son soutien aux Arméniens dans ce contexte de crise mondiale. « Nous souhaitons exploiter les opportunités offertes par les réseaux sociaux aujourd'hui. Les Arméniens du Haut-Karabagh disposent d'une voix influente, et l'Arménie a également un vaste réseau de soutien international. J'ai été enthousiasmé par la proposition des groupes arméniens de collaborer pour une campagne commune, et je suis convaincu que la première étape consiste à créer une grande communauté sur les réseaux sociaux où les Arméniens pourront se défendre mutuellement. Par la suite, nous ferons appel aux militants du climat pour qu'ils soutiennent également les Arméniens. Voilà le plan », a détaillé Ocampo.

Il a affirmé qu'il était inacceptable d'ignorer le génocide commis par l'Azerbaïdjan au Haut-Karabakh. « Le peuple du Haut-Karabakh a le droit de revenir. Tous les pays en sont conscients, mais personne ne fait rien. Je crois en le retour des Arméniens au Haut-Karabagh. Tout est possible. Nous, Argentins, avons jugé les généraux argentins responsables de la dictature militaire à une époque où personne ne croyait que c'était faisable. Tout est possible, mais il faut travailler pour y parvenir. Si personne n'agit, cela ne pourra pas se réaliser. Je suis convaincu que l'Arménie et le Haut-Karabakh doivent être protégés pour permettre le retour des Arméniens au Haut-Karabakh. Nous ne pouvons pas abandonner non plus les prisonniers arméniens dans les prisons de Bakou ; il est crucial de défendre leurs droits. Après le COP29, si Aliyev réussit à mettre en œuvre son programme pour paraître pacifique, il pourrait être trop tard pour sauver ces personnes. Nous ne pouvons pas permettre que le COP29 se déroule alors que 23 prisonniers arméniens sont encore détenus à Bakou. La question des prisonniers arméniens doit devenir une question centrale », a affirmé Luis Moreno-Ocampo, en soulignant qu'il est clair qu'en Azerbaïdjan, où il n'y a pas de système judiciaire indépendant, il est difficile de croire qu'un juge pourrait rendre une décision équitable et libérer les prisonniers.

Ocampo souligne que les Arméniens détenus à Bakou ne sont pas simplement des prisonniers de guerre, mais des victimes de génocide. Ils ont été arrêtés alors qu'ils tentaient de quitter le Haut-Karabagh. « Leur détention est un message clair de l'Azerbaïdjan : ne revenez pas au Haut-Karabagh. Parmi les prisonniers arméniens, deux sont des personnes souffrant de problèmes de santé, qui avaient essayé de se rendre en Arménie et sont maintenant accusées de crimes de guerre en Azerbaïdjan. Ces procédures judiciaires sont absurdes et ne méritent même pas d'être discutées, car il n'y a pas de juges indépendants en Azerbaïdjan », a-t-il souligné.

Il a exprimé l'espoir que le président azerbaïdjanais comprenne que, pour organiser la COP29 dans des conditions pacifiques, il doit libérer les prisonniers arméniens. « Notre campagne vient de commencer. Je suis persuadé qu'elle gagnera en ampleur. Il nous faut utiliser les technologies modernes pour diffuser notre message. Nous sommes des personnes réelles, préoccupées par cette situation.Tant que nous continuons à nous battre, nous ne sommes pas complètement perdus. Notre message est simple : ne jamais abandonner. Abandonner, c'est perdre. Je trouve énormément de plaisir dans mes échanges avec les Arméniens. Votre créativité est incroyable. Je ne sais pas jusqu'où nous irons ni ce que nous atteindrons, mais ce que nous faisons est juste et important », a-t-il conclu.